Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23.01.2016

Les coups de cœur du Club "Troc Cultures"

Les lecteurs du Club "Troc Cultures" vous proposent six romans, sur le thème " les Prix Littéraires 2015" qu'ils ont appréciés:

 

2084, La fin du monde - Prix de l’Académie Française 

Boualem Sansal  (R SAN)

 2084.jpg

L’Abistan, immense empire, tire son nom du prophète Abi, "délégué" d’Yölah sur terre. Son système est fondé sur l’amnésie et la soumission au dieu unique. Toute pensée personnelle est bannie, un système de surveillance omniprésent permet de connaître les idées et les actes déviants. Officiellement, le peuple unanime vit dans le bonheur de la foi sans questions. Le personnage central, Ati, met en doute les certitudes imposées. Il se lance dans une enquête sur l’existence d’un peuple de renégats, qui vit dans des ghettos, sans le recours de la religion…

2084, à la suite du 1984 d'Orwell, se veut une analyse détaillée de l’extrémisme religieux et de ses conséquences possibles. Un roman terrifiant, qui décrit les dérives d'une théocratie tyrannique.  Au fil d’un récit débridé, plein d’innocence goguenarde, d’inventions cocasses ou inquiétantes, l’auteur brocarde les dérives et l’hypocrisie du radicalisme religieux qui menace les démocraties. Cette critique de l’extrémisme n'est pas dénuée d’humour. L’auteur s’attaque aussi à la docilité de ceux qui vivent soumis par peur ou par confort. Ce livre nous plonge dans un univers très angoissant ou l'homme perd son libre arbitre et tout sens de vie sous une dictature religieuse ultra présente et manipulatrice. Nous suivons la tentative de fuite désespérée du personnage avec beaucoup d'intérêt. Très bien écrit, avec un scénario très intéressant et inquiétant en même temps.  

 

D'après une histoire vraie - Prix Renaudot

Delphine de Vigan  (R VIG)

d-apres-une-histoire-vraie-de-delphine-de-vigan.jpeg 

Ce thriller psychologique est le récit d'une rencontre entre l'écrivaine et une femme inquiétante qui va emmener le lecteur dans une zone trouble, entre réel et fiction. Delphine de Vigan raconte sa relation avec L., devenue son amie et confidente, qui par un jeu subtil va s'immiscer dans sa vie et la manipuler. Elle interroge aussi le rôle de la littérature, est-elle fiction ou réalité ?

 

Séduction, dépression et trahison sont les trois temps de ce récit qui entraîne le lecteur dans les coulisses de la création, là où le doute, les apparences et les faux-semblants tendent un piège redoutable. Qui est le maître du jeu ? L'auteur joue avec la frontière entre réalité et fiction de manière intelligente et habile.  La trame se développe avec chaque fois un nouvel élément qui bouscule. Ce qui suscite l’intérêt du lecteur. L. exerce une emprise croissante sur l’écrivaine en proie au doute, désormais incapable d’écrire, toujours plus isolée…

Une belle écriture et une aventure palpitante où l'on voudrait délivrer cet écrivain des griffes de cette psychopathe ! 

 

Encore - Prix Médicis étranger

Hakan Günday  (R GUN)

 

Hakan-Guenday-Encore-Galaade.jpgDans ce roman, le romancier turc aborde le sujet du trafic d'êtres humains. Gazâ, 9 ans, vit avec Ahad, son père, sur le bord de la mer Égée. Ahad gagne sa vie en transportant des clandestins entre l'est de la Turquie et la Grèce. En attendant qu'ils soient acheminés par bateau, il les garde chez lui, dans une cave : le dépôt. Et c'est Gazâ qui est chargé de s'en occuper. L’auteur fait le portrait d'un enfant monstre. Le jeune garçon est chargé d’entreposer la «marchandise humaine», de la mater, de la torturer.

Pendant des années, Gazâ et Ahad entreposent dans un dépôt cette marchandise humaine, ces individus qui viennent de parcourir plusieurs milliers de kilomètres. Jusqu'au jour où Gazâ cause la mort d'un jeune Afghan du nom de Cuma, le seul être humain qui ait fait preuve d'un peu d'humanité envers lui. Dès lors, dans ce monde violent et désabusé, Gâza ne cesse de penser à Cuma et conserve précieusement la grenouille en papier qu'il lui avait donnée – ce qui n'empêche pas Gazâ de transformer le dépôt en terrain d'observation des dynamiques de domination et de devenir le tortionnaire des clandestins qui ont le malheur de tomber entre ses mains. Cependant, un soir, tout bascule et c'est désormais à lui de trouver comment survivre... 

H.Gunday signe un roman extrêmement percutant et dérangeant. L'écrivain dénonce un système. Ce livre rend compte plus largement de l'exploration des maux et de la noirceur contenus dans toutes les sociétés humaines. Gazâ, narrateur torturé et tortionnaire est fasciné par l'exercice du pouvoir sur autrui. Ce roman dérange et captive.

 

Juste avant l'oubli - Prix Renaudot des lycéens

Alice Zeniter  (R ZEN)

JusteAvantLoubli_Plat1.jpg

Franck a rencontré Emilie il y a huit ans. Il est convaincu qu'elle est la femme de sa vie. Mais la jeune femme, thésarde, connaît une passion sans bornes pour l'écrivain policier Galwin Donnell, mystérieusement disparu en 1985. Auteur sur lequel elle rédige une thèse. Elle se rend sur une petite île perdue des Hébrides, en Ecosse, pour organiser un colloque qui lui est consacré. Franck compte l'y rejoindre et la demander en mariage. Mais rien ne se passe comme prévu.

Il règne à Mirhalay une atmosphère étrange. C’est sur cette île que l'auteur Galwin Donnell, a vécu ses dernières années avant de disparaître brutalement – il se serait jeté du haut des falaises. Depuis, l’île n’a d’autre habitant qu’un gardien taciturne ni d’autres visiteurs que la poignée de spécialistes qui viennent tous les trois ans commenter, sur les « lieux du crime », l’œuvre de l’écrivain mythique. Galwin Donnell, tout mort qu’il est, conserve son pouvoir de séduction et vient dangereusement s’immiscer dans l’intimité du couple.

Il s'agit d'une enquête sur la fin d'un amour avec des allures de roman noir. Un roman hybride entre polar, (fausse) biographie, critique du monde universitaire et l'histoire d'un couple. Alice Zéniter signe un récit noir et brillant. L'auteur crée avec beaucoup de talent tout un univers et une atmosphère oppressante. Elle mélange les genres: le pastiche et l'intrigue amoureuse, le polar et la bluette, dans un style parfait.

 

Jacob, Jacob - Prix Livre Inter

Valérie Zenatti  (R ZEN)

 

jacob-jacob,M170531.jpg 

Jacob, Jacob est l'histoire d'un jeune juif de Constantine ayant appartenu à la famille de Valérie Zenatti. C'était le frère de son propre grand-père. A 19 ans, en juin 1944, il quitte sa vie, sa famille, son milieu pour aller libérer la France. 

Ce roman raconte la guerre de ce jeune homme, les inquiétudes de sa mère, le quotidien des siens loin du front, entre deux langues et deux cultures, mais aussi la façon dont la courte vie de Jacob résonne en chacun. De sa guerre, les siens ignorent tout. Ces gens très modestes, pauvres et frustes, attendent avec impatience le retour de celui qui est leur fierté, un valeureux. Ils ignorent aussi que l’accélération de l’Histoire ne va pas tarder à entraîner leur propre déracinement. Les attentats se multiplient, la guerre se répand sur le sol algérien, et l’assassinat du Cheikh Raymond en juin 1962, un chanteur de Malouf, oblige la famille à s’exiler malgré elle dans le pays où Jacob a trouvé la mort.

L’écriture lumineuse de Valérie Zenatti, sa vitalité, son empathie pour ses personnages, donnent à ce roman une densité et une force particulières. Tissé de fiction et de récits familiaux ce récit sensible prête à la mémoire du disparu le souffle d'une vie émouvante, singulière, au sein de la grande Histoire. Ce récit parle aussi des inquiétudes d'une mère et d'une famille juive dans l'Algérie des années 40. Dans un récit d'une rare puissance, l’auteur raconte la guerre de ce jeune homme et de ses amis, loin dans ce pays, la France, qu'ils ne connaissent que par les livres. Par le biais du roman, l’auteur donne une existence à cet homme qui mourra en libérant la France.

 

Nouvelles d'ados - Prix Clara

(RJ NOU)

eho_clara15c-252x368.jpg

Le Prix Clara est un concours de nouvelles. Il s’adresse aux auteurs de moins de 18 ans au mois de septembre de l’année du concours. Il a été créé en mémoire de Clara, jeune fille morte à 13 ans d’une maladie cardiaque et qui rêvait d’écrire et de publier ses textes.

Pour cette neuvième édition, ce sont sept jeunes talentueuses plumes qui ont reçu leur diplôme des mains d'anciennes lauréates. Félicitations à Lucie Heiligenstein, 17 ans (Strasbourg), Anne-Lise Lafranche, 16 ans (Rennes), Tamara Raidt, 17 ans (Lyon), Louise Ravitsky, 17 ans (Montpellier), Elora Roudet, 17 ans (Bondoufle), Marie Semin , 17 ans (Bougival) et notre benjamine, Chimène Vanbremeersch, 13 ans (Malakoff).

Reflet des préoccupations et des espoirs d’une génération, ces nouvelles surprenantes nous invitent à suivre ces écrivains en herbe. Dévoilant une sensibilité à vif à travers des thématiques aussi diverses que la politique, la maladie, et le voyage, les nouvelles du Prix Clara ouvrent une fenêtre sur les rêves et les préoccupations des adolescents d'aujourd'hui. Amour, science-fiction, polar, témoignage, aventure : tous les genres sont explorés avec brio par ces jeunes, révélant ainsi leur intérêt et leur talent pour l’écriture. Ces nouvelles surprennent par leur fraîcheur, leur originalité, leur sincérité.

Au programme, une expérience par-delà la mort, une rencontre du troisième type avec un robot au grand cœur, ou le combat d’une jeune humanitaire contre Ebola. Drôles, mélancoliques, parfois violentes, ces adolescentes nous invitent à partager leurs préoccupations, leur regard tendre, amusé ou révolté sur l’actualité. Les sujets abordés ne sont pas facile : maltraitance, harcèlement, épidémie... Mais il y a toujours une lueur d'espoir. Chaque nouvelle a un style différent, son univers mais chaque fois ce fut une belle découverte.

 

Et pour finir les lecteurs vous proposent deux romans "hors thème" : 

 

Le Collier rouge 

Jean-Christophe Rufin  

 7770304790_le-collier-rouge-de-jean-christophe-rufin.jpg

Dans une petite ville du Berry, écrasée par la chaleur de l'été, en 1919, un héros de la guerre est retenu prisonnier au fond d'une caserne déserte. Devant la porte, son chien tout cabossé aboie jour et nuit. Non loin de là, dans la campagne, une jeune femme usée par le travail de la terre, trop instruite cependant pour être une simple paysanne, attend et espère. Le juge qui arrive pour démêler cette affaire est un aristocrate dont la guerre a fait vaciller les principes. Trois personnages et, au milieu d'eux, un chien, qui détient la clef du drame... Plein de poésie et de vie, ce court récit, d'une fulgurante simplicité, est aussi un grand roman sur la fidélité. Être loyal à ses amis, se battre pour ceux qu'on aime, est une qualité que nous partageons avec les bêtes. Le propre de l'être humain n'est-il pas d'aller au-delà et de pouvoir aussi reconnaître le frère en celui qui vous combat ?

Au lendemain de la guerre, Morlac croupit dans une prison. Pourquoi ? Qu'a-t-il fait ? Et surtout, quel est le rôle de son chien qui aboie sans interruption depuis l'incarcération de son maître ?

Un livre touchant sur l'après-guerre, les "petites histoires" de l'Histoire et la fidélité. Rufin maître des mots, nous fait trembler à travers un rescapé de guerre. Un puzzle prend forme : un chien hurlant, un prisonnier muet, un juge compatissant et une femme mystérieuse. Malgré les menaces, notre soldat affronte sa sentence pour sauver sa dignité et ses croyances. C'est une réflexion passionnante sur l'absurdité de la guerre. Une histoire très attachante, très humaine, avec des implications subtiles, sans longueurs, sans pathos, sans détails scabreux. Un style très simple pour une histoire pas si simple dans ses implications. 

 

L'enfant des marges 

Franck Pavloff 

9782226258328-j.jpg

Ioan, un photographe de renom, s’est retiré dans un mas des Cévennes après la mort accidentelle de son fils Simon. C’est là qu’il reçoit un appel de sa belle-fille qui lui signale la disparition de Valentin, son petit-fils parti pour Barcelone six mois plus tôt. Et celui qui vivait comme un reclus à consolider des murets en voie d’écroulement part à la recherche de cet adolescent qu’il connaît si peu. Ioan va arpenter tous les squats et autres lieux alternatifs que compte la capitale catalane, celle des marginaux, des révoltés, des sans-papiers, des artistes, des anarchistes, des mirages à la Gaudi avec sa Sagrada Familia en perpétuelle construction, des femmes engagées qui savent affronter l’amour comme la tragédie. Une ville où plane toujours l’ombre des combattants de la guerre civile. 

Dans une Barcelone étourdie par la crise, vibrante de toute l'énergie d'une jeunesse qui refuse le monde tel qu'il est, un homme part à la recherche de son petit-fils adolescent. Lui-même a tout quitté : sa solitude, la paix et l'oubli qu'il croyait avoir trouvés au fin fond des Cévennes. Et voici que dans la capitale catalane bruyante et révoltée, où plane l'ombre des combattants de 36, c'est sa propre histoire qu'il rencontre et dont il peut enfin se libérer.  L'écriture nous restitue une Barcelone et son ambiance fiévreuse, survoltée, avec ses marginaux, ses militants, sa violence, sa chaleur, son théâtre de rue, sa musique, ses trafics avec, en arrière-plan, l'ombre vivace de la guerre d'Espagne, ses plaies anciennes et ses cicatrices... 

Cet ouvrage est empreint d'amour, de poésie, de regrets, de descriptions imagées. Ce roman est coloré, libérateur, truffé de personnages hauts en couleur et attachants. Il s'agit d'une quête spirituelle belle et troublante qui se termine par une renaissance et une ode à la vie ! 

Les commentaires sont fermés.